Depuis la rentrée 2023, des cours d’éducation sexuelle sont prodigués dans les écoles dès l’âge de 6 ans. De nombreux parents s’interrogent, les esprits s’échauffent et le sujet est prétexte à pas mal de désinformation. Afin d’y voir plus clair et de répondre aux interrogations légitimes d’une partie de la population, L’Impertinent a souhaité organiser un débat entre les pour et les contre. Voici le résultat.
Les cours d’éducation sexuelle prodigués dans les écoles à partir de 6 ans ont fait couler beaucoup d’encre ces derniers mois, jusqu’à pousser des parents inquiets à agir. Le 30 avril 2024, un collectif a déposé une pétition au Grand conseil genevois afin de «s’opposer aux enseignements anti-scientifiques sur la sexualité à l’école publique», peut-on lire sur son site.
Le Collectif Parents se présente comme «un mouvement citoyen, non confessionnel et apolitique né en janvier 2021. Il regroupe des parents inquiets de voir leur autorité parentale niée par certaines autorités, et qui s’opposent à la mise en œuvre de nouvelles doctrines portant atteinte à l’intégrité de leurs enfants.»
Au sujet de l’éducation sexuelle à l’école, le collectif déclare: «Nous, parents résidant en Suisse romande, constatons que l’école publique familiarise nos enfants avec des concepts qui ne sont pas issus des sciences médicales et n’ont fait l’objet d’aucun débat démocratique. Ainsi, une institution à qui nous confions nos enfants, financée par nos impôts, trahit la confiance des parents en diffusant des notions motivées par une idéologie.»
A la source de leurs inquiétudes, la crainte que l’on détourne ces cours pour faire de la propagande LGBTQIA+, que l’on parle crûment de fellation ou de sodomie à des enfants, ou encore que l’on demande aux jeunes s’ils sont bien nés dans le bon corps.
La pétition du Collectif Parents a récolté près de 23'000 paraphes de citoyens issus de différents cantons romands.
De quoi parle-t-on?
Lors d’une séance d’information destinée aux parents vaudois, à laquelle nous avons assisté à Lausanne, il semblait plutôt clair que le sujet ne manque pas de nourrir les angoisses. D’autant parce que les intervenantes revendiquent le fait d’utiliser le vocabulaire du dictionnaire (pénis, cunnilingus, vagin, etc.) Beaucoup de parents ont exprimé leur volonté de parler de sexualité à leurs enfants eux-mêmes, à leur manière et surtout au rythme qu’ils considèrent approprié. «Je ne parle pas de relativité avec mon fils de six ans, expliquait un ingénieur présent dans la salle, je préfère aborder le sujet avec d’autres mots». D’autres regrettaient l’absence de l’enseignante ou encore de support précis lors de ces cours. Les conversations évoluant au gré des réactions des enfants et des questions posées.
Du côté des spécialistes, on a argumenté que si on n’abordait pas le sujet explicitement, cela laissait le loisir à l’implicite de faire des dégâts. «L’objectif de ces cours est de prévenir les abus, a déclaré une des animatrices, mais on ne pouvait pas le dire comme ça.». Ainsi, «la volonté du canton est de rendre difficile les refus d’y assister».
De fait, ce sujet est l’objet de spéculations qui entraînent une large désinformation. Tout ou presque est dit à ce propos et il est difficile de distinguer le faux – ou les interprétations émotionnelles – du vrai. C’est pourquoi il nous est paru plus que nécessaire d’organiser un débat sur la question entre le Collectif Parents et les organisateurs de ces cours.
Car 23'000 signatures, pour la Suisse romande, ne sont pas un non-événement.
Dialogue de sourds
Sur la RTS, l’émission Forum a tenté de lancer le débat en invitant deux élus (une employée de commerce et un viticulteur) à opposer leurs arguments. Pas de spécialiste de la question donc, l’échange – si on peut dire – est resté très superficiel. Le genre de «débat» mou et lisse, dénué de la moindre confrontation, dont la Suisse a le secret. On aurait tout aussi bien pu prendre mon facteur et ma boulangère – pour autant qu’ils aient des avis divergents sur la question – afin d'organiser un tel exercice à l'utilité relative pour les principaux intéressés.
Du côté de L’Impertinent, nous avons adressé une demande de débat à toutes les associations impliquées. Après quelques échanges, Santé sexuelle suisse nous a répondu: «Du fait de nos ressources limitées, nous privilégions les interventions dans les médias classiques à large audience.»
La fondation PROFA, qui gère ces cours dans le canton de Vaud, a été plus explicite: «La pétition du Collectif Parents contribue à la propagation de fausses informations sur l’éducation sexuelle. C’est pourquoi, à l’image de tous les organismes en charge de l’éducation sexuelle dans les cantons romands, la Fondation PROFA a cosigné la prise de position de Santé sexuelle suisse et d'ALECSS, l’association des spécialistes en santé sexuelle de Suisse latine. Cette prise de position, qui explique ce qu’est l’éducation sexuelle et comment elle est donnée dans les écoles en Suisse romande, est également soutenue par l’APE, l’Association vaudoise des parents d’élèves, ce qui nous réjouit.»
«A partir de là, ajoute-t-elle, nous estimons que les deux parties ont pu exprimer leur point de vue. Nous ne souhaitons pas continuer à alimenter la polémique à travers un nouveau débat, sans possibilité de consensus.»
«Il y a réellement un problème avec ces cours dans tous les cantons. Cela ne vient pas de nulle part!»
Nous avons également contacté l'association ALECCS. Par téléphone, la secrétaire s’est dite enthousiaste et favorable à un tel exercice, précisément car c’est le seul moyen de lutter contre la désinformation tout en répondant directement aux craintes de ces parents. Mais après discussion avec son comité, notre interlocutrice a justifié le refus par un très grand nombre de demandes.
Or, ce débat n’ayant jamais été organisé, on est en droit de vouloir savoir de quelles demandes il s’agit. D’autant que ces cours sont financés par le contribuable. Y compris celui qui n’est pas d’accord.
Interrogée sur ces différents refus, la présidente du Collectif Parents, Vanessa van der Lelij réagit: «Je trouve très dommage qu’ils refusent de débattre, étant donné qu’il y a réellement un problème avec ces cours dans tous les cantons. Cela ne vient pas de nulle part! Comme l’exemple de personnes transsexuelles venues distribuer leurs brochures militantes dans une classe de 10ème année en Valais. On voit l’infiltration de ce militantisme dans les écoles. Nous voulons des garanties sur le fait que l’identité de genre n’est pas au programme. Et pour ça il est nécessaire d’avoir une totale transparence sur le programme qui est prévu. En détail.»
Pourquoi le Collectif Parents était-il absent de l’émission Forum, qui a donc dû faire intervenir des élus? «On est d’accord de débattre. L’avocat de notre groupe s’y prépare, explique Vanessa van der Lelij. On avait refusé de répondre aux questions de la journaliste de 24 heures, car on sentait ses questions orientées. Pour l’émission de radio de la RTS, le délai était trop court et nous n’étions pas disponibles à la date demandée. Je ne suis pas contre le débat, tant que je sens les intervieweurs de bonne foi.»
Mélange des genres
Bien décidée à organiser ce débat quoi qu’il en coûte, j’ai lancé un appel sur une communauté WhatsApp regroupant plusieurs centaines de femmes LGBTQUIA+ à la recherche d’experts. Après avoir reçu plusieurs messages associant le Collectif Parents à une bande de complotistes infréquentables, j’ai été contactée par une travailleuse sociale ouverte au dialogue. Du moins en apparence. «J'ai été regarder le média pour lequel tu travailles et je ne suis pas du tout à l'aise avec la ligne éditoriale, a-t-elle fini par répondre, donc je préfère ne pas donner suite.»
Cette réaction est révélatrice d’une tendance. En effet, sur les réseaux sociaux, comme au sein des médias dominants, de graves associations d’idées sont émises à haute voix: les «antivax», «complotistes» sont forcément pro-Poutine, climatosceptiques, homophobes et transphobes.
On ne cesse de mettre les gens dans des cases tout en leur reprochant d’y appartenir. Procédé insupportable qui n’est certainement pas sans conséquence sur la radicalisation des idées. En l’occurrence, jamais L’Impertinent n’avait abordé des questions de genre sur ses pages. Mais peu importe, puisque les sujets sur lesquels il est interdit de s’interroger, d’exprimer des avis contraires, sont clairement identifiés dans les esprits, comme dans un genre de melting pot de sensibilités en danger.
Alors effectivement, s'il y a un rapport entre les périodes en question (Covid, guerre en Ukraine, etc.) c’est bien le refus systématique du dialogue, l’injonction à la pensée unique et l’impossibilité du débat. Tout discours qui n’entre pas dans la bien-pensance adoubée par les chantres du wokisme en représentation constante dans les médias dominants se retrouve invalidé.
Alors que «publier les choses que l’on ne veut pas voir publier», est censée être la définition du journalisme prêtée à George Orwell, ses tentatives valent à L’Impertinent d’être ostracisé. Nous ne nous y résoudrons pas et nous ne cesserons pas de chercher à ouvrir le débat.
L’Impertinent lance donc un appel: nous recherchons un(e) spécialiste de la question, favorable à la tenue de ces cours, qui serait d’accord d’en discuter avec un psychothérapeute du Collectif Parents afin de répondre aux craintes exprimées.
La démocratie et le débat d’idées vous remercient d’avance.
Je suis une grand-maman attentive à ce qui se passe pour les générations futures. Je constate aujourd'hui que l'école renonce à son rôle d'instruire les enfants de manière impeccable dans les matières utiles à préparer un avenir à ces derniers, ne serait-ce que d'apprendre une bonne orthographe, avoir une bonne rédaction et savoir compter. Pour ne pas faire de généralité, il y a des instituteurs qui sont top et il y a les autres !
Chacun à sa place, les instituteurs instruisent, les parents éduquent et parlent des choses de la vie, dont l'éducation sexuelle, à leurs enfants. A chacun son taf. C'est comme cela que mes parents ont fait, c'est ce que j'ai fait avec mes enfants et l…
Il y aurait bien Mme Marie-Estelle Dupont, elle a déjà fait plusieurs interventions sur le sujet.
j'ai eu l'occasion de visionner deux dépliants destinés aux enfants qui m'ont mise très mal à l'aise, notamment les dessins mais également les mots employés et le doute distillé, écrit en toutes lettres : tu peux ne te sentir ni un garçon ni une fille. cela me paraît totalement inadéquat de s'adresser ainsi à des enfants. laissons-les être des enfants et chaque chose en temps et heure, d'ailleurs pour la très grande majorité, heureusement, la question de se sentir fille ou garçon ne se posera pas. quel changement de discours depuis mon enfance, on se croit sur une autre planète
Lorsque je discute avec les parents et les enfants scolarisés dans le public autour de moi, aucun n’a conscience d’une quelconque « indoctrination idéologique LGBQT» de la part de l’instruction publique. Certains enfants trouvent au contraire tout ce « bruit » autour de ça incompréhensible, et même malsain, surtout vis à vis de leurs amis LGBTQ. Ce n’est bien sûr pas une preuve que ça n’existe pas. Mais pas besoin d’être « psychologue » pour voir que dans ce « débat », il y a aussi beaucoup de personnes qui, pour cacher leur propre mal-être, tentent désespérément de combler leur besoin narcissique criant de se sentir exister, sous le noble prétexte de « sauver des pauvres enfants endoctrinés ». Un débat entre extrémités qui sont mal dans leur peau et qui…